On ne présente plus Shein, ce géant de la fast fashion qui fait régulièrement parler de lui dans l’espace public et au sein des foyers. Mais que lui reproche-t-on exactement ? Des vêtements à bas prix, mais au coût social et environnemental élevé, des contrefaçons, des articles dangereux pour la santé des consommateurs, des campagnes de verdissement… Voilà une liste non exhaustive. Malgré cela, comment expliquer un tel succès ? Greenwashing, influenceurs, lobbying : décryptons la stratégie de communication de Shein.
Quelle est la stratégie de communication de Shein ?
Une présence multicanale massive
La popularité de Shein repose sur un principe simple : une omniprésence sur internet et sur les réseaux sociaux. Instagram, TikTok, Facebook, YouTube, publicité sur les moteurs de recherche… impossible de passer à côté. Et quand les consommateurs tombent sur ces annonces, difficile pour beaucoup de ne pas succomber tant l’argument du prix est convaincant. À l’heure où j’écris cet article (mai 2025), Shein compte 35,8 millions de followers sur Instagram et 10,1 millions sur TikTok.
La marque de fast fashion mise donc sur l’effet de masse. Elle veut se positionner en tête des requêtes des internautes et apparaitre sur leurs écrans, même quand ils n’ont rien demandé. Des campagnes de publicité dématérialisées font également partie de la stratégie de communication de Shein.
Des partenariats avec des micro-influenceurs
Shein parie également sur une stratégie de partenariats et d’influence rodée. Elle collabore avec des influenceurs aux millions d’abonnés et célébrités à l’instar d’Hailey Bieber. Mais là où la marque de fast fashion se distingue d’autres plus conventionnelles, c’est dans ses collaborations avec des influenceurs à faible audience. En échange de quelques vêtements offerts, ils recueillent des commentaires positifs et une mise en avant. Et cela sans presque rien dépenser (le coût de revient de ces vêtements est extrêmement bas). En complément, Shein propose un programme d’affiliation. Celui-ci permet à quiconque de bénéficier de réductions et de produits gratuits en échange de la promotion de la marque. La stratégie de communication de Shein repose sur une multiplication des partenariats avec des micro-influenceurs, et d’autres plus établis. Leur visibilité est ainsi maximale, et le budget publicité maitrisé.
Le déploiement de magasins éphémères
Shein ne dispose pas de boutique physique permanente. Cependant, elle ouvre régulièrement des magasins éphémères où tout est réuni pour inciter à l’achat et renforcer son image. Instants conviviaux, dégustations, tests de produits… de quoi passer un moment agréable et faire une sélection d’articles. Un concept positif si cela ne se faisait pas au détriment de l’impact écologique et social qu’entraine ce géant du prêt-à-porter.
Pourquoi peut-on parler de Greenwashing chez Shein ?
« Le terme de greenwashing est habituellement utilisé pour qualifier toute allégation pouvant induire le public en erreur sur la qualité écologique réelle d’un produit ou sur la réalité de la démarche développement durable d’une organisation »
Source : ADEME
Un storytelling de marque engagée
Sur son site internet, Shein énonce les grands axes de sa stratégie RSE. Ses ambitions sont affichées pour trois composantes majeures : l’environnement, l’humain et l’innovation. Malgré des études démontrant son impact colossal sur le climat et la biodiversité, des objectifs « verts » sont exposés. On peut par exemple lire leur engagement à décarboner leur ligne de production. Mais ces allégations ne correspondent pas au modèle économique de la marque. En effet, ce dernier encourage la surconsommation de produits de faible qualité et non durables. Si l’on se réfère à la définition de l’ADEME citée juste au-dessus, le terme de greenwashing peut ainsi être employé, puisque ces arguments de durabilité ne concordent pas avec la réalité de leur démarche globale.
Un verdissement des produits
Parmi les arguments écologiques étalés, la marque annonce une transition vers des matériaux plus responsables. Sur son site internet, on peut voir la proportion de matières utilisées pour la production de ses vêtements. À peine 10 % de celles-ci sont du coton, le reste regroupant un ensemble de fibres synthétiques. En effet, en mai 2025, le polyester représente 75 % du total, dont 6 % seulement proviennent d’une filière recyclée. Il semble que ces annonces de verdissement des produits représentent surtout un argument de la stratégie de communication de Shein. Par ailleurs, même si la marque parvenait à renverser la tendance et à s’approvisionner en majorité de matières synthétiques recyclées, l’impact environnemental demeurerait important. En effet, les quantités produites sont massives. Par ailleurs, un article dont le tissu est issu de la revalorisation n’est pas nécessairement vertueux. Il faut aller au-delà et s’intéresser aux teintures, accessoires, packagings, conditions de fabrication, transport, etc.
Source : Sheingroup.com, page « Our Impact »
📃Un petit exemple ?
Lors de votre session shopping, vous flashez sur un pull où est attaché une étiquette avec la mention « polyester recyclé, bon pour la planète ! ». Que penser de cette allégation ? On peut s’interroger… La marque fait-elle des efforts au global dans sa stratégie de production ? Y a-t-il un label certifiant du caractère recyclé de la matière ? Même s’il est avéré que le polyester est bien recyclé, on parlera ici de greenwashing car il n’est pas exact de dire que cette matière est « bonne pour la planète », bien au contraire.
Des conseillers RSE influents
Pour initier sa stratégie RSE, la marque d’ultra fast fashion a fait appel à des conseillers aux profils bien connus. Parmi eux figurent l’ancienne secrétaire d’État Nicole Guedj et l’ancien ministre Christophe Castaner. Ces nominations ont énormément fait réagir l’opinion publique et les professionnels du secteur. En effet, ces personnalités disposent d’un réseau influent et d’une visibilité publique importante. Ils craignent que cela renforce la légitimité de Shein auprès des décideurs et de l’opinion.
Comment Shein tire profit des consommateurs dans sa stratégie de communication ?
L’incitation à la surconsommation
En plus de son omniprésence sur les réseaux sociaux, Shein encourage la surconsommation à l’extrême au travers de son programme de fidélité et de sa stratégie de communication. Notifications quotidiennes, système de points à gagner lorsque l’on ouvre l’application, personnalisation des suggestions d’achat… Tout est prévu pour inciter les visiteurs à remplir leur panier. Les spécialistes vont même jusqu’à alerter quant au risque d’addiction et d’endettement.
L’utilisation de l’argument de défense des consommateurs
Au cœur de la stratégie de communication de Shein, un argument fait mouche : la défense des consommateurs. La marque revendique fièrement d’offrir à quiconque le droit de porter des vêtements à la mode, peu importe son niveau de revenu. Cette politique de démocratisation de la mode apparait dans leur discours officiel.
Shein fait passer les autres options, plus chères, pour des choix réservés aux plus fortunés. Elle se présente ainsi comme la seule solution vraiment abordable pour les petits budgets. Une manipulation de son audience qui semble fonctionner. Mais cette posture occulte la réalité des coûts sociaux et environnementaux de la fast fashion.
Des consommateurs toujours perdants
Au final, ce sont toujours les consommateurs qui y perdent. Ils bénéficient de vêtements certes peu couteux, mais dont la qualité laisse à désirer. Non seulement ils seront portés seulement quelques fois avant d’être jetés, mais ils représentent aussi des risques pour la santé. En effet, une investigation de Greenpeace Allemagne de novembre 2022 révélait que, sur 47 pièces Shein analysées, 32 % contenaient des « substances chimiques dangereuses à des niveaux préoccupants ».
Derrière une stratégie marketing bien ficelée et omniprésente, Shein construit habilement une image de marque accessible, moderne et, de plus en plus, responsable. Pourtant, en creusant au-delà des campagnes publicitaires et des engagements affichés, on découvre un modèle économique reposant sur la surconsommation et la production à bas coût. La promesse est encore loin d’être tenue (et impossible à tenir). Entre greenwashing et empowerment, la stratégie de communication Shein semble davantage orientée vers la gestion de son image que vers une véritable transition écologique ou sociale.
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FAQ | Stratégie de Communication SHEIN
Shein mise sur une présence massive en ligne, des partenariats avec des influenceurs, des campagnes publicitaires ciblées et des pop-up stores pour attirer une audience jeune et internationale.
La marque est omniprésente sur TikTok, Instagram ou YouTube, où elle collabore avec des micro-influenceurs et propose un programme d’affiliation, maximisant sa visibilité à moindre coût. La marque travaille aussi avec des personnalités suivies à l’échelle internationale.
Shein repose sur un modèle d’ultra fast fashion : production rapide, faible coût, renouvellement constant des collections et incitation à l’achat par des algorithmes personnalisés.
Oui. Malgré ses promesses écologiques, la marque continue à produire massivement des vêtements peu durables, en majorité synthétiques, en contradiction avec ses engagements RSE affichés.
Grâce à ses prix très bas, une stratégie axée sur la défense du pouvoir d’achat et une communication massive, Shein séduit un public à la recherche de mode tendance et accessible.
Sources de l’article :
- Comprendre le greenwashing. (n.d.). Le Site De La Communication Responsable. https://communication-responsable.ademe.fr/comprendre-le-greenwashing
- Vie-publique.fr. (2024, March 19). Proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile. https://www.vie-publique.fr/loi/293332-proposition-de-loi-fast-fashion-impact-environnemental-mode-jetable
- Morestin, F. (2025, March 27). Loi anti fast-fashion : des associations dénoncent un détricotage par les sénateurs. Novethic. https://www.novethic.fr/economie-et-social/transformation-de-leconomie/loi-anti-fast-fashion-associations-denoncent-detricotage-senateurs
- Soundron, M. F. (2024, March 6). Shein : 3 questions sur le géant de l’ultra fast-fashion qui s’installe à Paris. Novethic. https://www.novethic.fr/actualite/economie/economie/isr-rse/shein-ultra-fast-fashion-3-questions-sur-paris-151500.html
- Zhu, W. (2024, April 18). Surproduction et addiction : Shein, l’épouvantail de la mode mondiale. Alternatives Economiques. https://www.alternatives-economiques.fr/surproduction-addiction-shein-lepouvantail-de-mode-mondiale/00110057
- Garnier, J. (2025, January 14). La nomination de Christophe Castaner chez Shein indigne les professionnels français de la mode. Le Monde.fr. https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/01/14/la-nomination-de-christophe-castaner-chez-shein-indigne-les-professionnels-francais-de-la-mode_6497990_3234.html
- Qui sommes-nous | SHEIN FRANCE. (n.d.). https://fr.shein.com/About-Us-a-117.html
- sheingroup. (2024, October 25). Source Responsible products and materials – SHEIN Group. SHEIN Group. https://www.sheingroup.com/our-impact/planet/sourcing-responsible-products-and-materials/
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